Pâte à modeler

Trois

Ta robe glissait et suintait. L’assassin t’a couverte d’une jolie couleur. Arbore ce fleuve délicat. Découle vers l’avenir. Le Rien. Quelle douceur de te voir mourir. C’est délicieux même. Tu n’es plus qu’une fleur. Une fleur qui perd un à un ses pétales. Si belle, si serpentine. Tu tords ton corps. Tu l’enrobes de ta douleur, de ta peur, de ta peine. J’en mangerai de ces images. Tu me donnes l’envie, l’amour, la grâce. Ma muse meurt. Ma belle et douce… Je te ferai l’amour quand tout sera fini. L’odeur métallique de sang… Je t’aurai éviscéré moi-même si j’avais su que c’était si lourd de sens et de magnificence.

La rage au corps, tu voudrais te venger. Tu ne me vois même pas. Tapis dans l’ombre, je suis l’âme de l’ange qui t’emporte petit à petit. Je t’enferme dans mon appareil. Tu es mienne. Tu m’appartiens désormais. Te lécher jusqu’à nettoyer tes plaies. Une obsession. Tu meurs et je te désires en moi, à l’intérieur. Tu vivras dans mes veines. Réajuster l’imper’. Une bosse se forme dans mon bas. Les yeux qui s’éclairent à te voir souffrir et crier. Oui. Crie. J’adore ça. J’en craquerai une allumette, j’en attacherai tes poignets, je t’enfoncerai je ne sais quoi.

Tes tout petits doigts. L’illusion de la maturité trahit par tes mains. Par l’usage de ton outil artistique. Enfonce-les en toi. Dans cette plaie béante. Tes tout petits doigts. Tes joues, les plus câlines que j’ai pu toucher. Celles qui se frottaient contre mon visage cet après-midi.

Il pleuvait. Je t’ai donné un coup. Tu m’en veux. Je t’ai rattrapée. Je voulais te faire mal mais je ne voulais pas que tu m’en veuilles. Je me suis excusé. Je t’ai menti. J’aurai voulu te déchirer le corps. Tu ne m’as plus voulu chez toi. Ton dos était mou. Comme de la pâte à modeler. Je prenais mon pied à te le tordre. Tu n’osais rien dire. J’ai accordé de l’importance à ta respiration. J’aurai voulu te punir, vilaine petite salope. Mais tu n’avais rien fait. C’est peut-être pour ça que je t’ai baisé le dos.

Tu ne sais toujours pas que je ne suis pas le prince charmant ? Je t’utilise. Je m’en veux. Je te hais. Je te veux. Je me hais, rien de mieux… Mais grâce à toi, pas trop. La douceur est un luxe que je ne peux t’offrir. Maltraitance et castration clitoridiennes. Je t’aime dans la douleur, dans la peine, dans la destruction et dans les cris qui te déchirent la voix quand je te touche.

J’enfonçais alors les dents de mon instabilité dans ton petit cou si pur et sain. J’ai croqué à l’infinie sagesse de l’innocence. J’exorcisais quelques minutes mon âme malade de ne pas savoir pourquoi je fais tout ça.

Written on June 13, 2004